TIC-TAC, TIC-TAC… par François Leclerc

Billet invité.

La Hongrie, pays membre de l’Union européenne, traduit des réfugiés devant les tribunaux en vertu d’une nouvelle loi adoptée dans la précipitation. 367 d’entre eux sont poursuivis pour avoir franchi la frontière et, dans la majorité des cas, avoir endommagé la clôture barbelée qui en interdit le passage. Ils risquent entre trois en cinq ans de prison.

Plusieurs centaines d’autres attendent côté serbe au sud dans un campement de fortune une hypothétique réouverture de la frontière, tandis que d’autres encore, en nombre limité, tentent d’ouvrir une nouvelle voie vers le nord, en rejoignant la Croatie. Zoran Milanovic, son premier ministre, a confirmé qu’ils pourront passer : « nous sommes prêts à accepter ces gens, quelle que soit leur religion et la couleur de leur peau, et à les diriger vers les destinations où ils souhaitent se rendre, l’Allemagne et la Scandinavie ». La Slovénie, qu’il faut également traverser pour rejoindre l’Autriche au départ de la Croatie, avait précédemment signifié qu’elle était prête à faire de même et à accueillir 3.000 réfugiés. Arrivés en Autriche, une autre épreuve les attendra, les trains en direction de l’Allemagne ayant été suspendus. Après avoir occupé la gare de Salzbourg, des centaines de réfugiés ont entrepris de rejoindre à pied la frontière allemande, distante de 5 kilomètres.

Depuis Istanbul, il est également tenté de rejoindre la Grèce par voie terrestre, afin d’éviter la très dangereuse traversée de la mer Égée qui continue de faire de nombreuses victimes. Mais la majorité des réfugiés sont bloqués à la gare routière d’Istanbul, ou empêchés de traverser la frontière avec la Grèce à Edirne au nord-ouest du pays, quand ils y parviennent. Le Président turc Recep Tayyip Erdogan, dont le pays accueille deux millions de réfugiés, a déclaré « la solution au problème de réfugiés ne peut être de fermer la porte à ces gens ou de mettre des barbelés à la frontière. La vraie question est d’arrêter le conflit dans ce pays [la Syrie] le plus vite possible ».

Cette perspective étant incertaine et au mieux très lointaine, les dirigeants européens en sont toujours à chercher une solution pour accueillir un flux de réfugiés dont ils ont maintenant compris qu’ils ne l’arrêteront pas et ne peuvent que le ralentir. Devant l’urgence et les réactions allemandes, les ministres de l’intérieur de l’Union européenne ont avancé à mardi prochain leur prochaine réunion initialement convoquée pour le 8 octobre. Donald Tusk, le président du Conseil européen, devrait prendre demain une décision à propos de la convocation d’un sommet des chefs d’État et de gouvernement.

Afin arrondir les angles, il est désormais question d’un « mécanisme provisoire de relocalisation » de 120.000 réfugiés, dans l’attente d’autres décisions qui ne pourront pas manquer d’être prises quand ce quota sera épuisé. Mais l’opposition à ce dispositif, bien que minoritaire, ne faiblit pas, créant dans l’immédiat une situation qui va en s’aggravant tout au long de la route de l’exode. Pendant ce temps, une xénophobie nauséabonde est attisée par ceux dont c’est le fonds de commerce, créant un climat destiné à laisser des traces électorales.

Serait-ce la seule réponse qui, faute de mieux, pourrait être apportée en l’absence de tout rebond économique ? C’est en tout état de cause particulièrement inquiétant en France où le gouvernement socialiste se contente de faire le gros dos après avoir laissé pourrir des situations indignes à Calais, à Vintimille et à Paris. Quoiqu’il en soit, les nouvelles économiques ne sont pas bonnes : en dépit des actions de la BCE destinées à combattre la poussée déflationniste, Eurostat annonce que l’inflation dans la zone euro a été de 0,1% en août dernier, à nouveau en baisse. De son côté, l’OCDE constate que 2015 sera la cinquième année consécutive de décélération de la croissance mondiale. L’organisation fait part de ses « doutes grandissants sur les perspectives de croissance potentielle à moyen terme aussi bien dans les économies avancées qu’émergentes ».